A cent mètres du Centre du Monde

A cent mètres du Centre du Monde

Bonjour,

il est attendu d’un peintre qu’il s’exprime en plus par des mots…

comme si les mots pouvaient fournir des clés pour permettre à tous d’accéder

à un je ne sais quoi de la peinture,

qui ne serait pas de l’ordre de l’évidence.

Une sorte de notice technique susceptible de faire comprendre là précisément où rien n’est à comprendre sinon à investir, à occuper, à inventer…

La peinture ne peut être assujettie à un contenu de pensée,

elle est expérience d’un échappement de soi,

et en tant que telle, procède comme analyseur viral

pour chacun, qui la voit, la regarde

et la pense…

La peinture ne transmet rien,

au mieux, elle construit des conditions subjectives nécessaires

et non suffisantes pour l’autre,

pour des agencements et des constructions, dans l’ordre du désir…

je vous propose donc de descendre

au centre de votre gravité,

pour vous vivre comme l’origine même de cette peinture là…

au fond,

vous y trouverez un ensemble de règles,

d’exigences et de méthodes

qui sont les vôtres…

Vont-elles résonner avec la forme de ma peinture ?

vos percepts vont-ils faire ressurgir des souvenirs enfouis ?

Des sensations, des images, des idées…?

Va-t-il y avoir une coalescence des unités de cette gravitation de formes et d’idées ?

Du sens va-t-il naître spontanément sous vos yeux,

venu de l’intrication des deux poétiques d’espace, la vôtre et la mienne…?

L’interface sera-t-elle fertile ? existera-t-elle ?

existe-t-elle seulement ?

peut-être,

mais peut-être pas…

Je ne peux parler de ma peinture

que d’une façon générique,

c’est la rançon de la distanciation nécessaire pour le faire…

Ce court texte ne peut servir qu’à vous renseigner

sur mon « certain rapport « à ma peinture …

En vous parlant d’elle je l’invente, encore une fois,

autre évidemment,

comme je vous invite à le faire à votre tour,

car si la peinture existe, c’est sans doute dans cette marge de l’intime

et certainement pas dans son inscription sociale…

Joseph Maureso

Casa Carrere à Bages

Casa Carrere à Bages

Exposition à la maison Carrere de Bages, exposition partagée avec le peintre Patrick Soladie – été  2009

Sur les photos, un dispositif de 6 volumes  ( roseaux, cordelette de chanvre, profil polyester , acrylique …) qui participent tous d’une même oblicité, d’un même recouvrement coloré allant du livide au lie de vin, d’une même cambrure arrogante et dérisoire,  Certains sont pourvus d’un sexe de roseau , turgescent et violacé et leurs torses sont animés d’un souffle vain, immobile.

Je décris simplement ce que les photos ne montrent pas forcément et qui fut l’objet de mon intention. Je me demande bien quelles sont les raisons, les mobiles, les résonances affectives ou idéologiques etc… qui ont pu présider à la décision d’imager de tels objets…Je les ressens encore comme la trace d’une faille de ma personnalité, et c’est sans doute pour cela que je les aime encore…

Sous la tente à Bordeaux

Sous la tente à Bordeaux

 

« Sous la tente » à Bordeaux  –   2011

Installer son travail dans l’espace alternatif « sous la tente »,  à Bordeaux, chez Christophe Massé,  est une aventure forte ! Forte à bien des égards …

Ce n’est pas tant le lieu ou son principe original de fonctionnement, mais plutôt la personnalité de l’hôte. Hospitalier, généreux et délicat, il porte sur lui la profondeur an-amnésique  de sa famille et déporte simultanément la surface d’une identité de rupture, de frontalité qu’il exprime tant par ses textes que par ses actions performatives où règne la plasticité, au sens d’une poétique visuelle. Son regard est aiguë, il voit tout et oblige sans le vouloir une rigueur extrême. Il cristallise autour de lui tout un aréopage d’êtres hors normes  et à son contact analyseur, on se sent dégagé du fardeau des contingences sociales habituelles. « Sous la tente » souffle un vent de « liberté » que je ne suis pas prêt d’oublier…

 

Espace Lambert à Thuir

Espace Lambert à Thuir

Le « trou dans l’appeau » Espace Lambert à Thuir été 2013

Cette exposition reprend tous les éléments de l’exposition « le trou dans l’appeau » de 2012 à la Maison de la Catalanité à Perpignan, tous les éléments ou presque, à ceci prêt, qu’ils sont engagés dans un mode d’investissement de ce nouvel espace Lambert d’une façon radicalement différente puisque indexée sur le lieu, comme j’aime le faire. L’exposition précédente avait été conçue pour la maison de la Catalanité,  derrière la cathédrale st Jean, un espace conçu et réalisé par un architecte, avec tout ce qu’il faut pour repérer qu’il s’agit bel et bien d’une réalisation d’architecte, béton lissé au sol, métal rouillé stabilisé pour les portes et les huisseries etc….La typologie des formes des matières et des couleurs avait été prise en charge dans mon projet d’investissement du lieu y compris la symbolique du dos de la cathédrale . Je craignais que cette exposition transposée dans un autre lieu perde tout son sens, ce fut le cas mais contre toute attente, c’était bien mieux.

Quelle leçon puis-je tirer de cette expérience ?

Je peux  dire que moins on maitrise le sens, en tant que sujet actant l’œuvre,  que ce soit au niveau de la formation elle-même de l’œuvre qu’au moment de son installation contextuelle, et plus l’œuvre s’ouvre au regard de l’autre comme à notre propre regard. On remplace l’univocité de la chose induite par la plurivocité des jeux spontanés des signes endogènes et exogènes au travail au moment de la contextualisation de l’œuvre. l’œuvre doit s’affranchir du sujet actant l’œuvre, s’affranchir  de toute démarche, de tout enjeu proclamé pour exister en tant que telle. Une œuvre comme un enfant ne peut se construire qu’à partir de son émancipation.

 

Maison de la Catalanité

Maison de la Catalanité

« Le trou dans l’appeau » d’après un texte poétique d’Evelyne Maureso.

installation de peintures – géotextile / acrylique – et de sculptures -noisetier / cordelette de chanvre / latex naturel

Maison de la Catalanité à Perpignan

Hôpital du Val de Grâce

Hôpital du Val de Grâce

« Closques » stratifié polyester 250×120

installation dans le hall d’entrée de l’hôpital du Val de Grâce à Paris – 2009

Incongrue, cette exposition de « Closques », interprétée contextuellement comme exposition de « cloques », je rappelle que nous sommes dans un hôpital, pas n’importe lequel d’ailleurs  puisqu’il s’agit du Val de Grâce. L’œuvre colossale d’Ipousteguy , magnifique allégorie de bronze prévue pour ce lieu emblématique, a du supporter un temps  la promiscuité de mes coquilles vides, restes d’un drôle de repas, celui de la formation elle-même d’une œuvre, dans l’ombre de son atelier.

Œuvre repérée par mon amie Isabelle Bory, puis introduite dans ce lieu d’art atypique improvisé , dans son hall d’entrée aux proportions impressionnantes et à l’architecture étrange. Ce fut un plaisir pour moi bien sûr de travailler cette ambiguïté, de construire et d’agencer une poétique d’espace en tenant compte, à la fois de la structure architecturale, un chapelet d’ilots coniques de briques plates, et à la fois du territoire en élévation de mes  cuillères de ciel  ( comme elles furent interprétées…).

Des pupitres étaient disposés sur le parcours pour donner à lire des textes poétiques d’Évelyne Maureso,  qui ont comme d’habitude constitué  des clés, non pas pour comprendre ce qui n’est pas à comprendre, mais des clés pour investir cet espace exotique en ces lieux….

 

 

Musée Hyacinthe Rigaud

Musée Hyacinthe Rigaud

« El ven » série de dessins sur feuille d’arche 65×50  pastel / mine de plomb

exposition au Musée Rigaud à Perpignan 1994

Pourquoi le vent ?

Mon langage de formes s’origine dans le « Paradis perdu de mon enfance ». Fils unique et souvent seul dans la campagne, près de Perpignan , sur le territoire des « Aspres »,  territoire particulièrement venté, j’ai le souvenir diffus de mon ressenti.

Le vent anime l’immobilité du champ du sensible, il le traverse et me traverse créant ainsi une sorte de lien transversal entre cet espacement perceptif et moi même. Il me traverse mais je résiste, « je ne vais pas où le vent me mène » et je décide alors de fixer mon cap et de « tirer des bords » si nécessaire pour y parvenir. C’est là, que commencent à se construire les fondements d’une philosophie singulière de la vie, je n’en avais pas conscience alors mais aujourd’hui, j’ai dans l’idée qu’il existe une analogie processuelle entre mon rapport au vent d’autrefois et mon rapport actuel à la mouvance culturelle et artistique dans son principe. Je résiste aux présupposés enjeux de la peinture d’aujourd’hui.

Espace Roche Bobois

Espace Roche Bobois

« Africomania » est encore une suite de sculptures et dessins mais cette fois « expérientiels », à la limite du champ de mes préoccupations. Une boucle en sérendipité, pour aller chercher au cœur d’une digression le point de vue géométral différent pour débloquer la progression naturelle, naturelle c’est à dire dans un procès endogène, d’une œuvre en boucle à cette époque , inhabitable en quelque sorte..

L’idée était qu’un plasticien pouvait se glisser sous les marques signalétiques d’un genre quelconque dès lors qu’il s’inscrirait dans une typologie de formes familières et participerait d’une technologie de mise en œuvre connue  par lui-même .Combien le font pour enfourcher les tendances portées par les instances culturelles faisant autorité….

Imprégné depuis l’enfance de la statuaire de l’Afrique noire et connaissant les techniques du modelage et du moulage, enseignées par mon père, et ce dans les règles de l’art, et  répliquant la statuaire médiévale de Catalogne Nord depuis quelques années déjà pour les communes de notre département sous contrôle des Monuments Historiques, j’avais toutes les cartes en mains pour tenter l’expérience.

Le résultat fut étonnant, participant d’une destination prévue, l’œuvre pouvant être assimilée à l’œuvre en référence quelque chose venait s’indiquer au bord du discours de l’idem, comme une résurgence « d’ipséité » , démarquant la statuaire de l’art. Il y a quelque chose d’irréductible dans l’acte de création, quelque chose que l’on « ne peut nommer », et qui habite un objet, quelque soit sa destination ou son inscription sociale, la mémoire qu’il présuppose et celle qui est au travail, quelque soit le niveau de sa reconnaissance et les registres formels et sémiotiques qu’il engage , lorsqu’il est habité il rayonne, il résonne pour le sujet qui le voit et qui l’entend….